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Outils Low-tech et high-tech en CAA : et si on arrêtait de les opposer ? (3/3)

Nous terminons aujourd’hui notre série sur la tendance à opposer les outils low-tech et les outils high-tech en CAA !


Nous avons conclu, dans les deux premiers volets de cette série :

  • Qu'il n’y avait pas lieu de suivre un ordre dicté à l’avance dans l’introduction des outils de CAA et que l’utilisation des outils low-tech n’était pas un point de départ obligatoire ;

  • Qu’en misant tout sur des outils high-tech seulement, on risquait de faire vivre à nos utilisateurs de nombreux bris de communication, pouvant déboucher, entre autres sur des comportements-défis.

Pour lire les publications à ce sujet, cliquez sur les liens suivants :

Utiliser des outils low-tech a beaucoup d’avantages. Néanmoins, ces aides ont aussi leurs limites, et il nous semblait important d’en aborder certaines, dans ce dernier volet de notre série !


#3 Pourquoi ne pas se contenter des outils low-tech ?



Discutons aujourd'hui de 5 limites des outils low-tech que peuvent pallier les outils high-tech !


Limite 1 : Utiliser seulement des outils low-tech peut priver l’utilisateur d’une exposition à un vocabulaire complet et limite le développement langagier.

En dehors du PODD, la plupart des outils low-tech ne disposent pas d’un stock de vocabulaire suffisamment complet pour permettre à l’utilisateur de communiquer tout ce qu’il veut dire (ex.: transmettre des informations, faire des commentaires, demander quelque chose, raconter une blague, protester, etc.). Ils ne correspondent donc pas à eux seuls au critère de robustesse que l’on recherche en CAA (cf notre publication “Systèmes de CAA “robustes” : parlons-en !”, sur ce que signifie le terme “robuste”, en CAA).

Certains systèmes de communication, tels que les classeurs/cartables de communication de type PECS, se remplissent de vocabulaire au fur et à mesure que les mots sont introduits dans l’apprentissage. De ce fait, durant les trois premières phases de l’entraînement, qui visent à stimuler les demandes, les noms communs sont surreprésentés. Ainsi, on risque de priver le jeune d’une exposition à un vocabulaire riche et diversifié, pendant les premières étapes du PECS, si on n’utilise pas d’autres outils pour modéliser en parallèle (ex. : tableaux de vocabulaire de base) et limiter de ce fait le développement langagier (dont notamment, la possibilité d’allonger la longueur des énoncés, par des combinaisons incluant des verbes, des adjectifs, des pronoms, etc.).

Limite 2 : Utiliser seulement des outils low-tech peut réduire la stimulation et l'exposition de l’utilisateur à des fonctions de communication variées.

Certains outils low-tech, comme le PODD ou les tableaux de langage assisté favorisent l’expression de différentes intentions de communication, telles que le refus, les questions, les commentaires, etc.

Néanmoins, un grand nombre d’outils low-tech ne permettront pas d’accéder à des fonctions de communication plus complexes, telles que raconter un événement, une blague, décrire quelque chose, partager de l’information, en élaborant davantage.

Plusieurs outils low-tech sont parfois plus adaptés à l’expression d’une intention de communication à la fois : les tableaux de choix pour choisir, un bouton sonore pour attirer l’attention, les cartables/classeurs PECS pour exprimer des demandes (durant les 5 premières phases de l’entraînement).

Par conséquent, en utilisant seulement des outils low-tech non robustes, on risque de priver l’utilisateur d’une exposition à des intentions de communication variées, qui pourraient pourtant être modélisées dès le début de l’apprentissage, avec un appareil high-tech muni d’un vocabulaire riche.


Limite 3 : Utiliser seulement des outils low-tech peut limiter la planification motrice.

Certains outils low-tech ne permettent pas aux utilisateurs de mémoriser l’emplacement de leur vocabulaire :

  • Soit parce que le contenu est mobile, comme c’est le cas avec les classeurs/cartables PECS, dans lesquels les images sont fixées avec du scratch/velcro et peuvent être placées à différents endroits, en fonction des choix de l’utilisateur ou de ses partenaires de communication.

  • Soit parce que l’emplacement du vocabulaire n’est pas maintenu, d’un support à l’autre, comme on le remarque en observant la grande quantité de tableaux de langage assisté qui circulent sur Internet. D’un tableau à l’autre, le vocabulaire change de place, ce qui fait en sorte que l’utilisateur doit ré-apprendre l’emplacement des mots à chaque fois qu’il est exposé à un nouveau tableau.


L’utilisation d’un outil contenant un vocabulaire équilibré, dont les emplacements sont fixes facilite la planification motrice : l’utilisateur apprend à retrouver ses mots, de la même façon qu’on mémorise la position des lettres sur un clavier. Plus la personne est exposée à cette organisation stable, plus elle apprendra vite à les repérer !


Limite 4 : Utiliser seulement des outils low-tech peut réduire l’exposition de l’utilisateur à la rétroaction auditive.


Sans en faire une généralité, nous remarquons que l’accès à une rétroaction auditive, que permet aisément l’utilisation d’un appareil high-tech dès le début de l’apprentissage, a aidé plusieurs de nos élèves à produire des énoncés plus complets à l’oral et parfois plus intelligibles, à travers la modélisation des intervenants, qui enrichissaient leurs productions, en s’appuyant sur leur appareil. Par ailleurs, l’accès à la rétroaction auditive peut aussi permettre à l'utilisateur d’associer les symboles aux messages qu’ils transmettent, lorsqu’il explore son outil par lui-même (il entend le message, en activant le symbole), même si un partenaire de communication n’est pas présent. Ceci permet donc une exposition plus grande à la rétroaction auditive (avec la limite, néanmoins, que si le mot n’est pas connu ou que le symbole représente un concept plus abstrait, il sera difficile pour l’utilisateur d'y attribuer du sens, sans l’aide d'un partenaire de communication).


Limite 5 : Le problème de la transportabilité, de la solidité et des modifications.

Les outils low-tech sont souvent moins adaptés au déplacement. Plus ils contiennent de vocabulaire, plus ils deviennent lourds, volumineux et difficiles à transporter. Lorsque le système voyage entre la maison et l’école, il n’est pas rare que des images du classeur/cartable de communication se perdent. Remplacer les images perdues peut être un défi pour les partenaires de communication, qui n’ont pas toujours accès aux images (surtout quand elles ont été faites par quelqu’un d’autre : école, professionnels, etc.) ou à une plastifieuse pour les rendre plus durables. Il est plus chronophage d’améliorer un outil low-tech que d’ajouter un mot dans un appareil high-tech (à condition de savoir comment faire !). C’était justement l’une des barrières citées par les familles des utilisateurs, dans la méta-analyse de Berenguer et coll. (2022), que nous vous avons présentée cet automne (pour lire les publications à ce sujet, rendez-vous ici !) Avec des utilisateurs qui bougent beaucoup, dans notre école, on voit souvent le classeur/cartable s’ouvrir, et toutes les pages s'éparpiller par terre ! Nous rencontrons aussi des jeunes qui détériorent complètement leurs outils, retirent les scratchs/velcro qui fixent les images à l’intérieur. Ceci ne survient pas forcément dans des moments de crise, mais c’est parfois lié à certains rituels / manies. Il faut aussi penser aux partenaires de communication qui accompagnent les utilisateurs, et doivent souvent transporter différentes charges, en plus du système de communication. On entend des parents se demander comment emporter avec eux leur gros classeur/cartable PODD, lorsqu’ils se déplacent avec leur(s) enfant(s). Alors, plusieurs sont ingénieux et prévoient des versions allégées du système de communication, en prévision des sorties. Néanmoins, il manque du vocabulaire à l’utilisateur pour communiquer, dans ces situations !


Conclusion de la série

En conclusion de cette série, nous voudrions reprendre une belle image qui nous a inspirées, dans la publication de TobiiDynavox, concernant les mythes au sujet des outils low-tech et high-tech et l’importance de la multimodalité d’un système de CAA !

  • Voyons le système de CAA de nos utilisateurs comme une ceinture à outils !

  • Chacun a sa place et son utilité, à tout moment, en fonction des besoins et des contextes de communication.

  • Apprenons à nos utilisateurs à choisir le bon outil, dans la bonne situation, sans en négliger (opposer) aucun !



Références ayant inspiré cette publication :

Berenguer, C. ; Martínez, E.R. ; De Stasio, S. ; Baixauli, I. (2022) Parents’ Perceptions and Experiences with their Children’s Use of Augmentative/Alternative Communication : A Systematic Review and Qualitative Meta-Synthesis. Int. J. Environ. Res. Public Health 2022, 19, 8091. https://doi.org/10.3390/ijerph19138091 AssistiveWare. Vocabulaire spécifique à une activité ou utilisation d'un vocabulaire équilibré ? https://www.assistiveware.com/fr/apprendre-caa/vocabulaire-specifique-a-une-activite-ou-utilisation-d-un-vocabulaire-equilibre [consulté le 04 avril 2023] Tobii Dynavox (2016) AAC Myths Revealed. Myth : It is necessary to use low tech AAC tools or techniques before using a high tech communication device. https://download.mytobiidynavox.com/MyTobiiDynavox/td-myths-low-before-high.pdf [consulté le 04 avril 2023]



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